Douze Ans de Séjour Dans la Haute-Éthiopie |
|
Author:
| Abbadie, Arnauld d' |
ISBN: | 979-8-6187-9534-0 |
Publication Date: | Mar 2020 |
Publisher: | Independently Published
|
Book Format: | Paperback |
List Price: | USD $14.99 |
Book Description:
|
Comme en Grèce, dans l''antiquité, chaque trafiquant, à son arrivée dans l''île, est tenu de choisir un habitant qui lui sert de patron, préside à ses transactions et perçoit de légers droits. Durant les deux ou trois mois dits d''hiver, seule époque où quelque fraîcheur se fasse sentir, les indigènes aisés habitent des maisons en pierre, à un étage; ils vivent le reste du temps sous leurs huttes de nattes, qu''ils construisent quelquefois sur des pilotis plantés dans la mer afin de...
More DescriptionComme en Grèce, dans l''antiquité, chaque trafiquant, à son arrivée dans l''île, est tenu de choisir un habitant qui lui sert de patron, préside à ses transactions et perçoit de légers droits. Durant les deux ou trois mois dits d''hiver, seule époque où quelque fraîcheur se fasse sentir, les indigènes aisés habitent des maisons en pierre, à un étage; ils vivent le reste du temps sous leurs huttes de nattes, qu''ils construisent quelquefois sur des pilotis plantés dans la mer afin de jouir des rares brises de l''été. La marée, qui ne monte pas au delà d''un pied, et les vagues, qui ne sont que de légères ondulations, n''incommodent aucunement ces humbles demeures. Comme les bêtes de somme n''entrent pas à Moussawa, la boue et la poussière y sont très-rares. Le gouverneur habite une assez grande maison en pierre, à un étage, et couverte d''une terrasse encombrée de huttes en nattes destinées à ses femmes. Cette maison contient la salle du Divan, où il siége presque toute la journée; elle longe une petite place informe qui s''étend jusqu''au débarcadère, situé au nord de l''île et défendu en apparence par une demi-douzaine de canons en mauvais état. Le port, protégé contre les vents du sud par l''île même, et de ceux du nord par le cap Abd el Kader, a vingt pieds d''eau et un bon fond d''ancrage. Vis-à-vis le débarcadère et à l''O.-N.-O. se trouve le cap Guérar, jetée artificielle, longue d''une centaine de mètres et attenant à la terre ferme à 500 mètres environ de l''île; c''est par là surtout que Moussawa communique avec le continent; c''est par là aussi que la plupart des habitants aisés passent chaque soir en se retirant à Ommokoullo, village composé de huttes éparses et situé à une heure de la jetée de Guérar. Ils s''y rendent pour respirer un air qu''ils disent plus salubre et pour y être plus à l''aise que dans leurs demeures de l''île, où, à cause de la sonorité de l''atmosphère et de l''agglomération des maisons, ils ne peuvent presque rien cacher de leurs discours ni de leurs actions les plus intimes; à la pointe du jour, ils reviennent dans l''île pour leurs affaires. Les indigènes évaluent à 1,800 ou 2,000 âmes la population de l''île; aux époques des arrivées des caravanes, cette population s''accroît souvent de plus de moitié. Le sol nu et calciné réverbère la chaleur et la rend si intense que les indigènes même suspendent les affaires vers le milieu du jour; les rues sont alors désertes. Comme l''eau des citernes est insuffisante, les gens de Dohono en apportent journellement au moins 2,000 outres, environ 700 hectolitres, mais cette eau est saumâtre et désagréable pour un Européen; les gens aisés font venir leur provision du village d''Ommokoullo. Dans le bazar, on entend parler la langue indigène ou kacy, l''arabe, l''afar, le bidja, l''amarigna, le tigré, le saho, le galligna, l''hindoustani, le skipitare et le turc, sans compter les langues plus nombreuses encore parlées par les esclaves originaires des divers pays de l''Afrique centrale. Bon nombre des natifs de Moussawa tirent vanité de leur descendance arabe; leur teint foncé décèle en tout cas une race mélangée; l''expression astucieuse et vile qu''impriment à leurs traits leurs habitudes efféminées et leurs pensées toujours tendues vers le lucre, dispose peu en leur faveur. Ils ont le corps chétif, épuisé par les chaleurs et l''inconduite. Ils portent des turbans blancs, des caftans de couleurs vives et ordinairement en étoffe de coton très-légère; leurs pieds sont chaussés d''une espèce de sandale particulière à Moussawa; la plupart jouent avec un chapelet musulman dont les grains servent à leur arithmétique commerciale beaucoup plus qu''à leurs prières; durant l''été, tous agitent un éventail fait de feuilles de palmier, en forme de guidon. Les femmes, strictement voilées, sont souvent d''une rare beauté et d''une très-grande élégance de formes. Alléchée par l''appât du gain, cette population consent à vivre sur cette île stérile et brûlante, où elle ne tarderait pas sans doute à diminuer si des é