Du Feu Pour les Honneurs

Tout a commencé, nous étions à la maison mes enfants et moi, et mon mari au travail ; je n'arrivais plus à le joindre. Des hommes ont fait voler notre barrière en éclats. J'ai juste pu rassembler mes enfants autour de moi. Je serrais mes garçons, les derniers dans mes bras.--Tu es l'une des nôtres ; fait l'un d'eux, véhément. --Oui, c'est vrai ; je réponds avec espoir. --Mais pourquoi nous as-tu trahis ? Demande un autre.--Je suis Hutu comme vous, mes frères. --Une soeur qui pactise...
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Tout a commencé, nous étions à la maison mes enfants et moi, et mon mari au travail ; je n'arrivais plus à le joindre. Des hommes ont fait voler notre barrière en éclats. J'ai juste pu rassembler mes enfants autour de moi. Je serrais mes garçons, les derniers dans mes bras.--Tu es l'une des nôtres ; fait l'un d'eux, véhément. --Oui, c'est vrai ; je réponds avec espoir. --Mais pourquoi nous as-tu trahis ? Demande un autre.--Je suis Hutu comme vous, mes frères. --Une soeur qui pactise avec l'ennemi, tu vas devoir le payer ; ils s'avancent vers moi.--Je vous en prie. Prenez-moi et laissez mes enfants. --Seuls les mâles nous intéressent ; j'entends dire un autre. --Pitié. Je vous en supplie ; je tombe sur mes genoux, les yeux remplis de larmes.--Non, c'est trop tard ; réplique le premier. Estime-toi heureuse d'avoir la vie sauve.Aucune de mes supplications n'a d'effet sur eux, si ce n'est de d'amplifier leur colère. L'un des hommes m'assène un coup de pied qui manque de décrocher la mâchoire. Je lâche mes fils pendant quelques secondes, ce sont les secondes de trop. Ils me les arrachent mes fils et nous immobilisent, les filles et moi. Nous n'avons plus qu'à assister au spectacle effroyable qui nous est offert.Ils lâchent mes fils dans la cour tels des chiens et leurs demandent de courir, de prendre de l'avance. Quelques minutes plus tard, ils les rattrapent en poussant des cris de victoire et des chants d'allégresse. Je suis anéantie, traumatisée, marquée à vie de même que mes filles.Les Tutsi, les supposés ennemis ne sont pas les coupables. Les tueurs sont mes propres frères. Je suis moi aussi Hutu et viens d'assister au massacre de mes fils Hutu-Tutsi. Je pleure jusqu'à tarir la source de mes larmes. C'est la vision de l'effroi, l'horreur a atteint son paroxysme ; je ne savais pas qu'un homme pouvait être aussi cruel. Les victimes sont des gamins, c'étaient mes enfants. Ils étaient aussi leurs frères, neveux et cousins de par leur appartenance ethnique.